La centrale de Gennevilliers (suite)


Le découpage longitudinal de l'alternateur n'aurait peut-être pas été une très bonne idée, d'autant que les bobinages n'ont rien de mystérieux pour des électriciens. Mais, même si ce n'était pas le but, la seule dépose des 165 tonnes de l'induit, exhibant le maillage des enroulements de l'inducteur, produit un effet esthétique inattendu.

Le générateur est un alternateur triphasé à refroidissement par hydrogène produisant à 3 000 tours-minute 14 500 volts sous 5 000 ampères, dirigés vers le poste transformateur extérieur Fallou qui se chargeait de les élever à 220 000 volts.

A côté de la pièce maîtresse qu'est l'écorché du groupe turbo-alternateur, toutes les installations et pompes auxiliaires sont également découpées.

On flâne avec délectation comme dans un musée d'anatomie au milieu des pompes de renvoi aux chaudières, des bypasses, des circulateurs, des pompes à huile, des soupapes, des circuits d'hydrogène... Sont ainsi bien détaillés les labyrinthes d'étanchéité à proximité des paliers sur les circuits à haute pression.


Toujours dans l'optique d'un centre de formation, une maquette simulant le fonctionnement des circuits de vapeur de Super-Phenix fut installée à l'extrémité orientale du hall des machines (ci-dessous).

Echaudés par les leçons de la Grande Guerre, et terrifiés par la possibilité d'une attaque qu'on appelait alors "aéro-chimique" (ce qui dit bien ce que ça veut dire), nos gouvernants firent installer à partir du milieu des années 30 des abris où pourraient lors des bombardements se réfugier les personnels indispensables au bon fonctionnement des organismes et institutions, les autres ayant été en principe déjà évacués.

Il y eut des abris dans les ministères, dans les écoles, dans les usines (un jour, je parlerai de l'énorme abri aménagé par Renault dans les carrières de craie du Bas Meudon), dans les ateliers, gares et dépôts SNCF, etc., et bien sûr dans les centrales et dans certaines sous-stations. Ils existaient sous deux formes : tranchées abris ou tunnels abris d'une part (à quoi on peut joindre l'aménagement de carrières souterraines), constructions dédiées et élevées intégralement à cette intention d'autre part.

A Gennevilliers coexistaient les deux types : ci-dessous un tunnel abri sous les voies de chemin de fer, répertorié comme tel par les plans de défense passive de la centrale. Quant à l'abri dédié, il servit assez vite de local d'exercices incendie. On imagine dans quel état ce genre de loisir le mit. Aussi, toujours soucieux d'instruire mes visiteurs chéris, j'insère la vue intérieure de l'abri homologue de la centrale Arrighi de Vitry-sur-Seine, dont les dimensions et capacité étaient sensiblement égales.

Après avoir franchi le sas protégé par des portes blindées et étanches, on accédait aux pièces d'hébergement, habituellement accompagnées de magasins, de réserves (nourriture, piles, pharmacie, lampes, outils, couvertures anti-feu, produits de neutralisation des gaz, etc.). La vue ci-dessus montre précisément les tiroirs des filtres et le récipient contenant le chlorure de chaux ainsi que, au plafond, tout le réseau d'aération et les vannes (air gazé, air pur, air filtré...), mais le célèbre vélo sur lequel les cyclistes faisaient tourner à tour de rôle le ventilateur est hors du champ.

Pendant la Guerre froide, on maintint généralement ces installations en service, on en créa même quelquefois de nouvelles, dont l'abri du LCPC du boulevard Lefebvre est une des plus connues encore que des moins réussies, puis, l'Harmonie et l'Amour régnant enfin sur le monde, elles suivirent le sort des vieilles choses.

Sources :
Les Installations nouvelles de l'usine génératrice thermique de Gennevilliers, J. Stolz, éd. RGE, 1951 ;
La Rénovation de la centrale de Gennevilliers, A. Gage, Travaux, 1948 ;
La Centrale Arrighi 1931-1991, éd. EDF, 1996 ;
Centrale de Porcheville, notice générale 1958, EDF ;
divers documents sur la défense passive.