L'ancienne papeterie d'Essonnes
Chemin de fer à plaques de ripage
Corbeil-Essonnes, commune plutôt agricole au début du XIXe siècle à l’exception de sa papeterie, connut cependant vers 1865 l’extension
des usines Decauville (d’abord installées à Evry puis s’étendant sur la commune voisine), célèbres mondialement pour le chemin de fer
à voie étroite développé par Paul Decauville à partir de 1875.
On sait qu’avant lui, pourtant, il existait des voies ferrées
industrielles constituées de rails de bois, puis de fonte et enfin d’acier, installées depuis plusieurs siècles tant en France
qu’en Angleterre et en Allemagne. Mais tous les exemplaires existants ont été depuis longtemps ferraillés avec les usines
qu’ils parcouraient.
Tous ? Non. Il reste au moins un exemple de ces voies industrielles pré-Decauville, véritable fossile vivant montrant comment au
milieu du XIXe siècle on desservait les ateliers d’une fabrique de quelque importance. Il est hébergé dans un ensemble de deux
constructions, datées des décennies 1885-1905, se faisant face de chaque côté de l’Essonne que franchit une passerelle couverte.
Quand ces élégants bâtiments, qui abritent par surcroît une dizaine de piles hollandaises, auront disparu, pulvérisés à coups
de bulldozer pour satisfaire des lois prétendument incontournables, et que rails et wagonnets ne seront plus que des ferrailles
tordues, c’en sera définitivement fini de ce coelacanthe du chemin de fer.
Sur un étage complet, comprenant 800 mètres de voies de 50 centimètres de large, existe encore dans l'ancienne manufacture d'Essonnes
un réseau
complet de ce système dit à plaques de ripage ou à platelages, sur lequel peuvent encore circuler plus d’une vingtaine de
wagonnets divers : à caisse bois, à caisse métallique, corbeille à cassés, wagonnet porte-palonnier, citernes…
Il n’y a aucun locotracteur, ni aucune trace de traction animale. Et pour cause, le seul moteur étant l’huile de coude des
ouvriers : les wagonnets étaient poussés individuellement, et le changement de direction, sans le secours de la moindre pièce
mobile, se faisait par pivotement du wagonnet autour de l’axe le plus proche de l’opérateur, un peu comme on fait tourner une
voiture d’enfant en appuyant sur la poignée. La disposition des axes de roues permettait une manœuvre relativement aisée. Pour
effectuer le ripage, bien sûr, il fallait que le wagonnet eût quitté ses rails et se trouvât sur une plaque de fonte ad hoc,
d’où rayonnaient plusieurs directions.
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