La paire de Cheratte (suite)
La quasi-totalité des machines, moteurs, groupes et mécanismes a été ferraillée depuis la fermeture. Seule
son altitude a permis à la machine d'extraction du puits 1, remontant à 1907 et parmi les premières de Belgique à
être mues électriquement (en 1903 une machine électrique assurait déjà l'extraction au puits du Hasard Micheroux),
de rester en place, encore que passablement dévastée. Le dernier accrochage se situant alors au niveau de
313 mètres, et les cages n'étant pas très vastes (2,5 tonnes de charge utile), une puissance relativement
faible, très comparable d'ailleurs à celle des moteurs à vapeur contemporains, fut adoptée,
soit 180 chevaux pour chacun des deux moteurs d'extraction. Comme l'exiguïté de la paire s'opposait à
l'implantation d'une centrale électrique de capacité suffisante, le courant de 48 Hz, fabriqué 8 kilomètres
plus loin à Micheroux, d'abord élevé à 6,5 kilovolts pour parcourir la ligne, était ensuite, arrivé à Cheratte,
abaissé à 220 volts, tension d'alimentation de tous les moteurs, y compris le moteur synchrone
d'un convertisseur Ward Leonard.
Ce moteur, calculé pour 400 chevaux, entraînait la génératrice de 330 chevaux qui fournissait le courant
continu sous 150 volts aux deux moteurs d'extraction fournis par la Compagnie internationale d'électricité de
Liège et branchés en série.
Sur l'arbre unique étaient calés les bobines de 4,12 mètres de diamètre, recevant 600 mètres de câble plat en
acier, et, au milieu, un tambour de frein sur la jante duquel s'appliquaient deux sabots réunis par une
tringlerie. Par défaut, un pesant contrepoids maintenait les sabots en pression. Les positions de montée,
descente et immobilisation de ce contrepoids, et donc des freins, étaient transmis depuis un moteur
continuellement en rotation par l'intermédiaire d'un double embrayage magnétique à la disposition de la
main gauche du machiniste, tandis que la main droite déplaçait le levier de mise en route et d'inversion
de marche.
Comme le Ward Leonard se trouvait au rez-de-chaussée, en compagnie des transformateurs, des moteurs de
ventilation, des pompes, des résistances, etc., toutes ces installations ont pris en rangs par deux et en
chantant la direction du cubilot. On ne peut s'empêcher de regretter ce vandalisme en pensant à l'intérêt
qu'aurait eu un ensemble du début du XXe siècle encore en état.
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En haut, le siège et les deux poignées de marche (avant et
arrière) et de freinage. A la droite du machiniste, le répéteur de signaux provenant des niveaux desservis. L'ensemble
offre une certaine similitude avec le siège du Chronoscaphe du regretté mais diabolique professeur Miloch.
En dessous, les commandes électromécaniques : à gauche, le controller assurant automatiquement le changement de vitesse par
shuntage de l'induit et l'inversion de marche par renversement de l'excitation de la génératrice du Ward Leonard. A
droite, le tambour à cames commande l'embrayage du moteur du frein.
Les deux vignettes suivantes montrent des détails du controller où les arbres se déplacent dans un bain d'huile.
Enfin, ci-après, le contrepoids du frein et son moteur d'entraînement embrayable pour le réarmement. |
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Les splendides moteurs continus. Bien qu'isolables électriquement, ils
sont montés sur un arbre unique dont une extrémité commande l'indicateur de position des cages disposé juste en face du
machiniste. En revanche, la consultation du tachygraphe Karlick (dont la dépouille mortelle est visible ci-dessus sous
le crochet du palan) devait nécessiter une gymnastique antisyndicale. |
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Les moteurs et les tambours calés sur un arbre unique tournaient forcément dans le même sens.
Donc, pour que la circulation des cages se fît en sens opposé, exigence nécessaire à l'équilibrage des efforts et à la
diminution de la puissance nécessaire, les câbles métalliques plats étaient évidemment enroulés en
sens inverse sur chaque tambour. Ils étaient guidés dans l'axe du puits par les poulies de contrainte installées
juste sous les moteurs et donc décalées.
Quant aux cages, il s'agit encore du modèle initial, de 2500 kg de charge utile, circulant dans le puits rectangulaire
(5 x 2,5 mètres).
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