L'hôtel-Dieu de la Trinité d'Etampes (suite)

Le "pavillon blanc", ainsi qu'on appelait l'aile de médecine, construit en 1834, est l'un des plus beaux bâtiments de l'hospice. Bénéficiant du legs Baugin, ce qui attribua à la rue voisine le nom du bienfaiteur, il était d'abord consacré à l'hébergement des vieillards, puis à des lits de médecine en 1936.
La façade sud est ornée, sur le péristyle dorique, d'une verrière de 1910, d'abord prévue sur un étage, puis couvrant les deux, de façon que les pensionnaires généralement infirmes ou invalides de chaque étage pussent en profiter. On ne jugea pas nécessaire d'installer un ascenseur, même au cours des travaux d'extension concomitants. Il paraîtrait que les plans d'architecte la reconstitueraient dans le projet final actuel, en nouveaux matériaux, étant bien entendu que sa dépose a été conduite avec toute l'absence de soin dont font preuve habituellement les entreprises de démolition.
Ci-après, le pavillon blanc est pris depuis le premier étage du bâtiment de la communauté. Sur la gauche, dans le prolongement de la chapelle, le nouveau dortoir du XVIIe siècle, surélevé au siècle suivant, réaffecté en salles de médecine et réaménagé vers 1910, au cours des grandes transformations de cette décennie.
En dessous, une vue plus rapprochée de la verrière campée sur son portique tétrastyle. Les documents de l'époque l'appellent verandah, dans l'orthographe alors en usage. Il est amusant de constater que, si l'on enlève la véranda pour reposer le fronton sur le portique, on reconstitue plutôt fidèlement une pure façade dorique. Tout y est, métopes, triglyphes, entablement... Seul le tympan a été perforé pour y installer une horloge. La verrière lui sert de rehausse, en quelque sorte.

Façade sud de l'aile de médecine.
L'intérieur recèle une vraie merveille, l'escalier d'origine à double volée. Il est classé MH. Pas de balustres sculptés, pas de bois rares ni de marqueterie, ni de courbes savantes. Il est rustique et fonctionnel, mais par la science de ses volées et l'agencement de ses rampes montre une simple élégance qui ne manque pas de noblesse. De plus, malgré l'abandon du bâtiment qui l'héberge et les sévères variations climatiques, les assemblages du bois, depuis près de cent quatre-vingts ans, ne montrent ni faiblesses ni dislocations.


Au premier étage une salle de malades a été modifiée en salle hydrothérapique, comme en fait foi l'inscription directionnelle suivante. Quant à la véranda, elle garda son rôle, toutefois solennisé par l'appellation solarium.
Les travaux de démolition ont détruit toutes les armatures métalliques de la véranda. Jadis, les malades infirmes n'avaient que cette vue, certes apaisante, à travers le seul endroit de loisir qui leur était consenti, faute d'ascenseur.

Etabli sur un bahut de bois ciré, le monte-plats manuel (ci-contre) manoeuvré par chaîne venait directement de la cuisine établie dans la cave voûtée sous le pavillon blanc. Les plats étaient ensuite portés vers les réfectoires des malades et du personnel, au rez-de-chaussée.
Ci-dessous : comme dans un certain nombre d'hôpitaux désuets jusqu'aux années 70 sinon 80, les WC, ceux du personnel en tout cas, jouaient souvent un curieux rôle de débarras, de fourre-tout, de placard. Outre les accessoires de ménage comme balais ou serpillières, ce n'était pas anormal d'y rencontrer des étagères de serviettes ou de linge, qu'on aurait pu croire rangés ailleurs. Mais en l'occurrence j'affabule peut-être...
Il est bien dommage que la pompe correspondant à cet en-tête, installée en 1845 sans doute dans les sous-sols, n'ait pas été conservée. (Pour ma part, j'y aurais attaché plus d'importance qu'aux nonosses exhumés par les archéologues, opinion qui n'engage que moi et que je ne cherche nullement à faire partager.) L'épithète hydrobaliste est plus qu'inhabituelle, alors que la décomposition des racines fait bien comprendre qu'elle lance de l'eau, comme les pompes à incendie.
Tout ce qu'on en sait est qu'il s'agissait de pompes à double effet de type Bramah, modifié par Vasselle, qui d'ailleurs fut chargé d'une réparation de la pompe de l'hospice. Un balancier (double dans le cas qui nous occupe) mouvait une palette diamétralement disposée et la faisait pivoter alternativement dans le corps de pompe cylindrique, selon un axe concentrique à celui du corps, et chaque mouvement oscillant admettait l'eau dans une des chambres formées par le mouvement alternatif rotatif en même temps qu'il la refoulait de l'autre chambre. Les soupapes étaient contenues dans un logement formé par un diaphragme radial dans le corps de pompe, venant de fonderie et limitant le mouvement de la palette piston.
Je suppose que tout le monde a compris.
On appelle ça aussi une pompe semi-rotative. Beaucoup de pompes d'un système similaire existent encore, sous un nom très connu que je laisse deviner à mes lecteurs (une entreprise qui a fait entre autres des moteurs, des machines à écrire, et qui a mis au point le casque des soldats de 1915).

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